Tout d’abord, la liquidation judiciaire ne doit pas être confondue avec la liquidation amiable
La liquidation amiable est une procédure de dissolution et de liquidation d’une entreprise décidée par ses dirigeants et ses actionnaires, s’il y en a, par délibération de l’assemblée générale extraordinaire de la société.
La liquidation judiciaire d’une entreprise, en revanche, est ordonnée par le tribunal de commerce ou le tribunal judiciaire (anciennement tribunal de grande instance). La liquidation judiciaire est donc une liquidation forcée subit par les parties prenantes de la société alors que la liquidation amiable intervient par la libre décision des associés qui choisissent de mettre fin à cette aventure entrepreneuriale.
La procédure de liquidation judiciaire est réservée au débiteur (l’entreprise) qui se trouve en état de cessation des paiements et dont le redressement de l’entreprise est manifestement impossible. Autrement dit, le débiteur n’arrive pas à régler ses dettes professionnelles arrivées à échéance (cotisations sociales, impôts, dettes fournisseurs, salaires, loyers…) et ses créanciers réclament le paiement de leurs créances immédiatement (aucun moratoire accordé).
L’ouverture d’une telle procédure par le tribunal permet :
- d’une part, la cession des actifs du débiteur lorsqu’il n’existe aucune chance de survie de l’entreprise (par le redressement judiciaire ou la cession de l’entreprise elle-même). Le tribunal met fin à son activité et le mandataire judiciaire liquidateur sera chargé de vendre les biens de son patrimoine et de répartir l’argent obtenu entre les créanciers selon l’ordre de paiement prévu par la loi.
- d’autre part, la cession de l’entreprise où il est question de vendre l’entreprise à un tiers qui s’engage, dans le cadre d’un plan de cession arrêté par le tribunal, de maintenir l’activité, tout ou partie des emplois et de verser une somme d’argent afin d’apurer le passif (voir la procédure de cession de l’entreprise).
Lorsqu’il apparaît que le débiteur ne remplit pas les conditions requises pour l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire, le tribunal rejette la demande.
Qui peut demander l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire ?
Les personnes physiques et les personnes morales de droit privé (les sociétés) qui exercent une activité commerciale ou artisanale et qui ont une entreprise ou un siège social dans le ressort du tribunal peuvent demander l’ouverture d’une liquidation judiciaire en déposant au greffe du tribunal une déclaration de cessation des paiements.
Le tribunal peut également être saisi sur requête du ministère public (Procureur de la République) ou sur assignation d’un créancier, quelle que soit la nature de sa créance.
Cas du débiteur (personne physique ou morale) qui a cessé son activité :
Lorsque le débiteur a cessé son activité professionnelle (exemple du retraité), il peut demander l’ouverture d’une liquidation judiciaire sans condition de délai si tout ou partie du passif provient de son activité professionnelle. Le tribunal peut également être saisi par le ministère public.
En revanche, si un créancier souhaite assigner ce débiteur en liquidation judiciaire, cette assignation doit intervenir dans le délai d’un an à compter de :
- la radiation du RCS pour un commerçant ;
- la radiation du RCS consécutive à la publication de la clôture des opérations de liquidation amiable pour une personne morale ;
- la cessation de l’activité pour un artisan ;
- la publication de l’achèvement de la liquidation amiable pour une personne morale non soumise à l’immatriculation.
Cas du débiteur (personne physique) décédé :
Le débiteur, qu’il soit commerçant ou artisan, décédé en état de cessation des paiements peut faire l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire (uniquement pour ses dettes professionnelles). Le Tribunal peut être saisi dans le délai d’un an à compter du décès, sur assignation d’un créancier, quelque soit la nature de sa créance, ou sur requête du ministère public. Il peut également être saisi sans condition de délai par les héritiers du débiteur au moyen d’une déclaration de cessation des paiements.
Quand demander l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire ?
L’ouverture de la liquidation judiciaire doit être demandée par l’entrepreneur ou le dirigeant de l’entreprise en difficulté au plus tard dans un délai de 45 jours à compter de l’état de cessation des paiements, à moins qu’il n’ait demandé, dans ce délai, l’ouverture d’une procédure de conciliation (Voir la notice sur la déclaration de cessation des paiements).
La liquidation judiciaire peut également être prononcée par le tribunal lors d’une conversion de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire en liquidation judiciaire. De plus, lorsqu’il apparaît que le débiteur est en état de cessation des paiements lors de l’exécution d’un plan de sauvegarde ou de redressement, le tribunal peut prononcer la résolution de ce plan et l’ouverture d’une liquidation judiciaire. Enfin, l’ouverture d’une telle procédure peut être la conséquence d’une demande d’extension d’une procédure de liquidation judiciaire ouverte contre un débiteur initial et étendue à une autre personne (physique ou morale) en cas de fictivité de la personne morale ou de confusion des patrimoines.
Que se passe-t-il à compter du jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire ?
Le jugement d’ouverture de la procédure prend effet à compter de sa date.
Au prononcé du jugement, le débiteur doit se rapprocher du mandataire judiciaire liquidateur pour connaître la procédure à suivre et notamment la liste des différents documents à lui fournir. Le débiteur doit veiller à respecter scrupuleusement la procédure et à rester en contact avec le liquidateur pour une bonne coopération.
- L’ouverture de la liquidation judiciaire entraîne l’interdiction pour l’entrepreneur ou le dirigeant de l’entreprise en difficulté de payer une dette née avant ce jugement.
- L’entreprise doit cesser immédiatement toute activité sauf en cas de maintien de celle-ci prononcée par le tribunal pour une durée de 3 mois (prorogeable d’une même durée à la demande du Procureur de la République). La poursuite de l’activité est nécessaire si une cession de l’entreprise est envisageable ou si l'intérêt public ou celui des créanciers l'exige pour préserver les stocks, le fonds de commerce ou encore, pour permettre l’exécution de certains contrats importants ou l’arrivée à leur terme. Dans cette hypothèse, le liquidateur va gérer l’entreprise et il sera le seul à pouvoir exiger l’exécution des contrats en cours en fournissant la prestation promise au cocontractant. (NB : si la liquidation judiciaire intervient pendant la période d’observation d’une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, l’administrateur est maintenu dans ses fonctions jusqu’à l’issue du maintien provisoire de l’activité.)
- Le débiteur est dessaisi du droit d'administrer ou de vendre ses biens, même ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit, tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée par un jugement du Tribunal. Les droits et les actions du débiteur concernant son patrimoine sont alors exercés par le liquidateur pendant toute la durée de la procédure. Les biens de l’entreprise sont destinés à être vendus afin de rembourser, dans la mesure du possible, tout ou partie des créanciers.
- Toutes les créances que les créanciers détiennent sur l’entreprise, deviennent immédiatement exigibles, même si elles n'étaient pas encore arrivées à leur échéance.
Qu’est-ce-que la liquidation judiciaire simplifiée ?
Lors d’une demande d’ouverture d’une liquidation judiciaire d’une petite ou moyenne entreprise, le tribunal, en statuant sur cette demande, doit se prononcer sur l’application ou non du régime juridique de la liquidation judiciaire simplifiée.
Cette procédure est applicable aux débiteur sans bien immobilier, n'ayant pas employé plus de cinq salariés au cours des six mois précédant l'ouverture de la procédure et ayant réalisé un chiffre d'affaires hors taxes ne dépassant pas 750.000 euros.
Lorsque cette modalité simplifiée et accélérée de la liquidation judiciaire est retenue, ce choix n'est pas définitif puisque, à tout moment, le tribunal peut décider, par un jugement spécialement motivé, de ne plus faire application de ce régime dérogatoire. Ce sera le cas lorsque le traitement du dossier se révèlera plus compliqué que la dimension modeste de l'entreprise permettait de le présumer, en particulier lorsqu'il apparaîtra que devront être engagées des actions visant à la reconstitution du gage commun des créanciers.
La liquidation judiciaire simplifiée se caractérise également par son accélération puisque le tribunal devra clôturer la procédure au plus tard dans le délai de six mois de la décision d'opter pour la procédure simplifiée. Ce délai est porté à un an lorsque le débiteur emploie plus d’un salarié et que son chiffre d'affaires hors taxes est supérieur à 300.000 euros. Dans tous les cas, le Tribunal peut proroger la liquidation judiciaire simplifiée pour une durée qui ne peut excéder trois mois.
Comment se termine la procédure de liquidation judiciaire ?
Dès qu'il ouvre ou prononce la liquidation judiciaire, le tribunal doit fixer le délai au terme duquel la clôture de la procédure devra être examinée, sachant que, si elle ne peut être prononcée à cette date, le Tribunal pourra proroger le délai mais il devra le faire par une décision motivée.
Le tribunal peut se saisir d'office, être saisi à tout moment par le mandataire liquidateur, le débiteur ou le ministère public, ou être saisi par tout créancier mais seulement à l'expiration d'un délai de deux ans à compter du jugement de liquidation judiciaire.
Il existe deux hypothèses de clôture de la procédure de liquidation judiciaire :
- La clôture pour extinction du passif qui intervient lorsqu'il n'existe plus de passif exigible ou que le liquidateur dispose de sommes suffisantes pour payer les créanciers.
- La clôture pour insuffisance d'actif qui est prononcée lorsque la poursuite des opérations de liquidation judiciaire est rendue impossible en raison de l'insuffisance de l'actif ( lorsqu’il ne reste plus rien dans le patrimoine du débiteur pour payer les créanciers). La procédure s'arrête alors faute d'actif à liquider. Il est possible que le tribunal prononce la clôture de la procédure pour insuffisance d'actif lorsque l'intérêt de la poursuite de la procédure apparaît disproportionné par rapport aux difficultés de réalisation des actifs résiduels. Dans le même but de favoriser le prononcé plus rapide de la clôture et ainsi d'abréger la durée de la liquidation judiciaire, le tribunal peut désigner un mandataire ayant pour mission de poursuivre les instances en cours et de répartir, le cas échéant, les sommes perçues à l'issue de celles-ci. Cette clôture par anticipation permet de mettre un terme à la procédure sans attendre l'issue d'un procès, par exemple, qui peut prendre des années et qui retarde d'autant la clôture de la liquidation et la libération du débiteur.
La clôture entraîne la fin du dessaisissement du débiteur, il redevient maître de ses droits et il ne subit plus aucune des restrictions de pouvoir qu'avait emportées pour lui la liquidation judiciaire. Corrélativement, la mission du mandataire liquidateur prend fin.
Une fois la clôture prononcée, s'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées pendant le cours de la procédure, celle-ci peut être reprise à la demande du mandataire liquidateur précédemment désigné, du ministère public ou de tout créancier intéressé.
NB : Si c'est un créancier qui saisit le tribunal, il doit consigner les fonds nécessaires aux frais des opérations, qui lui seront remboursés par priorité sur les sommes recouvrées. La reprise de la procédure produit ses effets rétroactivement pour tous les actifs du débiteur que le liquidateur aurait dû réaliser.